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Le retour des mercenaires dans les conflits du XXIe siècle

« Chien de guerre », c’est comme cela qu’étaient désignés les chevaliers partis combattre pour un salaire dans les Etats allemands durant la période médiévale. Le terme est resté pour désigner les mercenaires, aujourd’hui on parle de "Contractor". On pensait cette profession disparue, elle est revenue plus forte que jamais.
Le retour des mercenaires dans les conflits du XXIe siècle

L’apogée de la profession a été la guerre en Irak ou il y avait plus de Contractors que de soldats sur le terrain. Un mercenaire se bat avant tout pour l’argent et n’est pas rattaché à une armée régulière. Il ne faut pas les confondre avec les bénévoles français partis combattre Daesh aux côtés des Kurdes en Syrie par exemple ou les soldats de la Légion étrangère, qui eux sont une unité régulière de l’armée de terre française.

Rares sont les mercenaires en première ligne pour des missions offensives. Généralement ils sont employés soit par des sociétés privées ou de riches locaux pour protéger leurs biens et leurs infrastructures contre les menaces d’un conflit, comme ce fut le cas durant la guerre civile en Côte d’Ivoire entre 2002 et 2007. On les emploie également pour du renseignement sur le terrain, ou de la formation d’armée régulière, de milices ou souvent pour la  garde présidentielle étrangère.

Les mercenaires français sont très appréciés sur le marché

Le plus connu était Bob Denard (connu en Afrique pour avoir fait défiler les soldats noirs et blancs ensemble, ce qui était une première pour l’époque). Aujourd’hui la profession compte très peu d’officiers, mais plutôt des sous-officiers et des soldats du rang. Les militaires préfèrent travailler pour des sociétés de sécurité ou d’intelligence privées pour des raisons variables mais l’appât du gain, ou l’insatisfaction des conditions de travail dans une armée régulière (avancement nul, bureaucratie militaire oppressante, reconversion) sont souvent en tête des motivations. Certains sont aussi motivés par des  raisons personnelles et idéologiques : le goût du risque, de l’aventure ou l’engagement politique

Les salaires sont variables : de 25 000 euros pour travailler au Qatar à 1800 euros pour les Syriens se battant pour l’Etat Turc en Azerbaïdjan. Tout dépend du profil et de la nationalité du Contractor.

Comment devient-t-on mercenaire ?

Des formations sont dispensées en France :  une agence de formation professionnelle propose un stage d’un mois à 4 810 euros (voyage et hébergement compris) entre Clermont-Ferrand et la Pologne. Vous apprendrez le maniement des armes et vous bénéficierez d’une simulation de guerre durant quatorze jours à l’est de l’Europe. Une autre agence propose pour la modique somme de 4 500 euros, une certification professionnelle de Contractor. Dans tous les cas, un casier vierge, vous sera toutefois réclamé.

Il faut juste que vous sachiez que vous n’aurez pas le statut de combattant à l’étranger. Au mieux vous serez considéré comme expatrié, au pire comme criminel. Contrairement au monde anglo-saxon, la France a un retard juridique dans ce secteur. En France, la loi de 2003 reste restrictive pour le mercenariat. Mis à part une ouverture en 2014, concernant la possibilité d’autoriser une sécurité privée pour les navires en haute-mer, certainement liée à la recrudescence des actes de piraterie, il y a un grand vide juridique en France. Ce qui est assez hypocrite venant d’un Etat qui multiplie les Partenariats Public Privé avec son armée et des sociétés privées, notamment en termes de formation : la formation étant un domaine de prédilection des mercenaires.

Enfin ce flou juridique a trois conséquences. La société anglo-saxonne n’hésite pas à recruter les Français qu’elle juge bien formés par leur pays d’origine, ces derniers étant attirés par le salaire, mais également le statut juridique, au détriment des intérêts français. Certains Contractors se perçoivent comme des « corsaires des temps modernes », pirates combattant pour le compte de leurs pays et souhaitant préserver les intérêts de la France. Mais, comme nous l’a montré l’exemple du lobbying, un manque d’encadrement entraine toujours des dérives.

D’un point de vue pragmatique tout le monde à recours au mercenariat. Les sociétés privées ont un besoin de protéger leurs infrastructures durant un conflit ou dans une zone à risque. Pour les Etats, c’est un peu moins avouable. Mais la fin d’une armée de conscription a entrainé de facto la libéralisation de la sécurité privée. Il est plus économique en termes d’argent et de diplomatie d’avoir recours à des Contractors, que des soldats d’une armée régulière.  Toutefois, un problème se pose : la présence d’une force armée hétéroclite, obéissant à des intérêts privés, sur le terrain est ce qu’il y a de plus imprévisible. Les plus optimistes pensent que le marché du mercenariat se régulera lui-même une fois encadré… ce qui est loin d’être rassurant.